Déborder Bolloré

Faire face
au libéralisme autoritaire dans le monde du livre.



Les Soulèvements de la terre

Ce document est extrait de la publication multiformat Déborder Bolloré. Il a été généré puis rendu accessible sur deborderbollore.fr, la plateforme hébergeant toutes les ressources autour du projet, dont cette contribution. Déborder Bolloré met en avant la pensée de chercheureuses, d’imprimeureuses, d’éditeurices et de libraires qui analysent et/ou subissent les dynamiques de concentration et d’extrême droitisation du marché. Chacun·e tente de formuler, depuis sa position respective, des réponses à cette question urgente : comment faire face au libéralisme autoritaire dans le monde du livre ?

Trois propositions pour une pratique du démantèlement (de l’empire Bolloré)


En juillet 2024, la campagne pour désarmer l’empire Bolloré a été lancée avec un sentiment d’urgence. Urgence à faire exister un front de lutte large et puissant face à la menace fasciste matérialisée par la montée de l’extrême droite et le RN aux portes du pouvoir. Quelques mois plus tard, force est de constater que l’urgence est devenue imminence.

De l’autre côté de l’Atlantique, la victoire de Trump, le salut nazi de Musk et les décrets par dizaines créent un état de sidération : purge de dizaines de milliers de fonctionnaires, déportations scénographiées à coups d’avions militaires, annonces d’invasions brutales du Canada, du Groenland ou du Panama, censure via intelligence artificielle de centaines de mots-clés allant de « femme » à « réchauffement climatique » en passant par « race » et « historiquement », des programmes de recherche1, création d’un bureau de la foi2 et fuite en avant dans le génocide du peuple palestinien.

En France, dans les sphères médiatique et politique, on ne compte plus les déclarations d’allégeance et les marques de fascination à ce techno-fascisme. L’interrègne dans lequel nous nous trouvons depuis les élections législatives de juin 2024 marque tous les jours un peu plus le trait d’union entre extrême droite macroniste et extrême droite traditionnelle : fin du droit du sol à Mayotte3, hommages des ministres à Le Pen père, apparition de Retailleau aux côtés du groupuscule identitaire Némésis, Bayrou parlant de « submersion migratoire », 109 milliards d’euros investis pour l’intelligence artificielle et le soutien du gouvernement — à peine voilé — au génocide du peuple palestinien. L’extrême droite est déjà au pouvoir. C’est d’ailleurs ce que déclarait un cadre du RN le 25 septembre 2024 sur France Info : « Bruno Retailleau a très bien appris notre programme, il le récite à la perfection et pratiquement à la virgule près, je ne vais pas dire que ça ne nous satisfait pas4. »

Ici comme outre-Atlantique, les grandes corporations capitalistes sont à la manœuvre, mettant leur puissance économique et financière au service de projets politiques et idéologiques fascistes. Depuis plusieurs années en France, le groupe Bolloré, via l’achat de Vivendi puis de Hachette, a méthodiquement façonné le paysage médiatique, tant éditorial qu’audiovisuel. L’intuition de la campagne « Désarmer Bolloré » est de s’attaquer directement aux fondements économique, médiatique et idéologique de l’extrême droite. C’est une façon de dire : « Détournons la focale des élections ; tout ne se situe pas là. » Le fascisme c’est une forme plus violente du capitalisme, plus ouvertement raciste, coloniale, masculiniste, mais qui s’abreuve aux mêmes structures d’oppression et de domination.

La proposition de la campagne contre Bolloré est d’ordre politique, tactique et organisationnel. Politiquement, nous disons : il est primordial de cibler le pouvoir de ceux qui possèdent les outils de production et de trouver comment le démanteler, l’exproprier, le reprendre. Tactiquement, nous augmentons notre surface d’attaque contre l’extrême droite et pointons des cibles plus concrètes et atteignables matériellement, car les succursales d’un groupe d’une telle envergure sont présentes à travers tout le territoire. L’une des ramifications de cet empire se trouve très sûrement près de chez vous. Du point de vue organisationnel, cette campagne permet de constituer un front large où les modalités d’actions — du désarmement à la soirée d’information et de la manifestation déterminée à l’armada de bateaux pirates — se renforcent mutuellement en formant une puissante caisse de résonance.

Le texte qui suit tente de répondre à la question : comment démanteler l’empire Bolloré ? Les ébauches de propositions esquissées ici ne prendront pas la forme d’un programme prêt à l’emploi mais de réflexions ouvertes que nous souhaitons mettre en discussion. Nous ne croyons pas à un démantèlement par le haut, les pouvoirs publics n’en ont ni les moyens, ni la volonté. Nous croyons en la coordination de résistances populaires.

La campagne ayant été lancée à l’appel d’une centaine d’organisations signataires5, nous écrivons depuis une de ces composantes : les Soulèvements de la terre. Notre affaire est donc : comment des dynamiques de luttes peuvent émerger, se coordonner, et ainsi se rendre capables d’atteindre des points de rupture sur des projets aussi importants que la construction de méga-bassines, d’autoroutes ou le monopole de milliardaires sur la quasi-totalité des médias ? Nos hypothèses sont inspirées de notre expérience dans les luttes territoriales depuis quatre ans et discutées âprement lors de débats entre camarades. Au cœur d’entre elles, il y a la perspective de démantèlement des industries nuisibles. Il s’agit d’envisager chaque projet toxique comme un maillon d’une filière. Par exemple, les méga-bassines sont une part de l’agro-industrie6, l’A69 de l’industrie du bitume, ou les sablières de Saint-Colomban de l’industrie du béton7. Lutter contre un projet s’inscrit alors dans une perspective plus vaste, ce qui permet, entre autres, d’élargir le champ de bataille en visant directement les infrastructures d’une filière8. Mais cette stratégie du démantèlement est mise à l’épreuve par la campagne « Désarmer Bolloré ». Elle se situe hors du champ de l’écologie et s’appuie sur un objet plus difficilement saisissable qu’un projet précis comme la construction d’une autoroute ou d’un aéroport, car il s’agit de saper un empire qui finance l’extrême droite et la nourrit idéologiquement.

Lutter contre l’empire Bolloré avec en tête une stratégie de démantèlement, cela veut dire ne pas se restreindre à cibler les vecteurs de diffusion directe des idées réactionnaires que sont CNews, Europe 1, Praud, Morandini ou Hanouna. Il s’agit d’envisager l’empire dans son entièreté et dans toute sa complexité. Face au caractère tentaculaire de l’empire Bolloré, il nous faut adopter une stratégie et des tactiques multiformes, selon les secteurs. Cela nécessite d’identifier au sein de cet empire colossal les prises concrètes sur lesquelles nous pouvons agir directement ou indirectement. L’objectif est toujours de provoquer un effet domino, au sein d’une filière, puis de filière en filière. Le chemin vers le démantèlement de l’empire Bolloré est donc pavé d’expérimentations et de tentatives qui permettront de rassembler un front commun et de nous doter collectivement de nouvelles possibilités d’agir contre l’extrême droite, bien au-delà du cas particulier de Bolloré.

I. Comprendre et défaire les filières


La puissance du groupe Bolloré s’appuie sur le développement d’un empire économique et financier colossal, dont la dynamique d’extension et de diversification est multidirectionnelle. Il peut s’étendre horizontalement à travers des secteurs diversifiés (médias, culture, agriculture, industrie, énergie, etc.) mais parfois aussi verticalement par la maîtrise d’une grande partie de la chaîne de production.

Dans les années 1980, la reprise de l’entreprise de papier familiale, à Ergué-Gabéric, près de Quimper, permet à l’entrepreneur Vincent Bolloré d’expérimenter ce qui va ensuite devenir une marque de fabrique : rachat d’une entreprise, acquisitions dans le même secteur pour contrôler la production, la transformation et la distribution, diversification des activités, et souvent, revente. Suite à la reprise de la papeterie qui produisait notamment les papiers OCB, en 1985, le groupe se développe dans le tabac et les cigarettes en Afrique, jusqu’à arriver en situation de quasi-monopole en Afrique francophone. Il gère tout : production, fabrication, vente9. À partir de 1997, le groupe Bolloré choisit de renforcer son activité en Afrique. D’abord via la participation à la Socfin, « qui contrôle environ 390 000 ha de concessions de palmiers à huile et d’hévéas en Afrique et en Asie10. » Mais également via le transport et la logistique11 : grâce aux plans de libéralisation de l’économie imposés par le FMI et la Banque mondiale et aux liens étroits qu’il entretient avec les chefs d’État africains, il met la main sur des infrastructures portuaires, routières et ferroviaires à travers l’Afrique. Dans les années 2010, le groupe Bolloré Africa Logistics représentait plus de 80 % des bénéfices du groupe. La quasi-totalité des activités logistiques du groupe — en Afrique et en Europe — seront revendues début 202412. Il reste un groupe industriel de premier ordre via la logistique pétrolière, mais également grâce à Blue et Blue Systems qui forment un ensemble d’entreprises allant du contrôle des flux13 aux batteries électriques. Parallèlement, à partir des années 2000, il acquiert des médias (Vivendi, Canal, etc.), des agences de publicité et de conseil en communication (Havas), un institut de sondage (CSA), puis des groupes d’édition (Editis puis Hachette) et des salles de spectacle (Olympia). C’est la face de l’empire la plus connue et la plus visible aujourd’hui, notamment en France. En revanche, on sait moins que, fidèle à ses fondements coloniaux, le groupe investit aussi massivement en Afrique dans l’industrie audiovisuelle et culturelle, construisant des studios, des salles de concerts, de cinéma et développant des chaînes de télévision (les chaînes des groupes Thema ou Multichoice ou simplement Canal+)14.

Ce rapide tour du propriétaire n’a pas pour but d’être exhaustif, mais de mettre le doigt sur le fonctionnement du groupe. Il agit par extension dans un secteur, acquérant de nombreux points de la chaîne et dupliquant les opérations dans plusieurs pays. Comprendre comment les activités du groupe Bolloré sont organisées au sein d’une même filière permet de dessiner des axes de lutte. La question du démantèlement peut se poser secteur par secteur et non plus d’un seul bloc, c’est-à-dire à l’échelle de l’empire Bolloré. Ce qui rend la tâche relativement plus facile à appréhender. Car une fois que sont identifiées les entreprises qu’il maîtrise dans un secteur donné, de nombreuses prises deviennent imaginables.

Dans cette perspective d’analyse sectorielle, l’exemple du monde de l’édition est paradigmatique, dans la mesure où le groupe Bolloré est aujourd’hui présent sur l’ensemble de la chaîne du livre. Depuis l’acquisition de Hachette en 2023, c’est connu, il possède de très nombreuses maisons d’édition15. À l’image d’i-Télé devenue CNews ou de Canal+, il a commencé les restructurations brutales. C’est le cas de la maison d’édition Fayard, à la tête de laquelle il a nommé Lise Boëll, éditrice d’Eric Zemmour et de Philippe de Villiers, qui a depuis publié en grande pompe le livre de Jordan Bardella. Le groupe Bolloré contrôle également la distribution des livres avec l’entité Hachette Livre Distribution et l’impression avec Lightning Source France. Via les boutiques Relay, appartenant à Vivendi, la commercialisation est, elle aussi, assurée dans les gares et les aéroports. L’influence du groupe sur les librairies s’exerce également de façon indirecte. Hachette, en tant que premier groupe éditorial français, s’assure que quasi aucune librairie, aussi indépendante soit-elle, ne puisse supprimer de ses rayons les livres édités par ses maisons d’édition.


Face à un tel monopole, par où commencer ? Comment s’y attaquer ? Depuis novembre 2024, la campagne « Désarmer Bolloré » a impulsé un mouvement pour défaire son emprise sur le monde de l’édition en visant en plusieurs endroits, parfois successivement, parfois simultanément.

Les premières à dégainer ont été les librairies indépendantes. Cet automne, plus de quatre-vingt d’entre elles ont appelé à « escamoter » Hachette. Conscientes des enjeux du milieu du livre et faute d’être en capacité financière de pouvoir réellement boycotter Bolloré, elles proposaient à leurs collègues de vendre moins de livres Hachette et plus d’éditions indépendantes. Leur tribune rappelle avec justesse qu’il faut voir plus loin que la seule littérature ouvertement d’extrême droite : « Plus que le livre de Bardella, c’est tout le système Bolloré qu’il faut pouvoir appréhender et faire chuter : un livre n’est pas qu’un texte imprimé, c’est toute une économie à laquelle il appartient. Tout autant que leur contenu, les modalités de fabrication et de circulation des textes ne sont pas neutres. Elles importent. Comme bien souvent, le pouvoir dans le livre est logistique16. » Que cette première tribune vienne des librairies indépendantes n’est pas anodin, tout comme cet ouvrage, publié par un nombre inédit de maisons d’édition. Cela nous dit en creux qu’une des modalités du démantèlement d’un empire comme celui de Bolloré c’est de reprendre en main, de façon non capitaliste, la chaîne de production et de distribution du livre. Il y a là une piste qui doit se creuser entre les acteur·ices indépendant·es et les travailleur·euses d’un groupe comme Hachette.

Pour accompagner cette tribune, des centaines de milliers de marque-pages et de stickers invitant à ne plus acheter de produits Hachette et à privilégier les maisons d’édition indépendantes ont été imprimés. Ils ont été distribués dans tout l’Hexagone aux groupes locaux des organisations participant à la campagne. C’est une sorte de grand jeu, facile à prendre en main, qui est vite devenu viral. Les règles : aller voir des librairies indépendantes proches de chez soi et les inviter à rejoindre le mouvement, glisser les marque-pages de manière pirate dans les livres Hachette dans les grandes surfaces, les Fnac, etc., ou encore coller directement des stickers sur les livres d’extrême droite. Le but : faire chuter les ventes du groupe Hachette. De nombreux témoignages, photos et vidéos ont été envoyés. Ces gestes très rapides et très simples se sont répandus dans des centaines de points de vente. À tel point que la direction de Lagardère s’est fendue de plusieurs notes internes à destination des boutiques Relay. L’une d’entre elles, que nous avons publiée sur le site de la campagne17, demande aux employé·es de retirer les marque-pages et les stickers et indique que « ces incidents touchent l’ensemble des enseignes et librairies qui vendent des livres Hachette ». Cette opération, toujours en cours, est un moyen pour tout un chacun de mettre un pied dans la campagne. Certains groupes locaux, à l’instar des comités franciliens des Soulèvements de la terre18 proposent d’en pimenter les modalités. Il est possible de répandre de la glue ou de la peinture sur les livres les plus ouvertement fascistes, ou plus magiquement, de les faire disparaître pour que plus personne ne puisse les lire. Ces actions effectuées souvent en petits groupes anonymes, en appellent d’autres, un peu plus visibles.

Lors de la première semaine d’actions décentralisées contre l’empire Bolloré qui a eu lieu du 29 janvier au 3 février 2025, au moins une quinzaine de boutiques Relay ont été prises pour cible19. Fanfares, batucadas et banderoles surgissent dans les gares. Les enseignes sont recouvertes de slogans. Des petits groupes se faufilent dans les boutiques pendant que d’autres distribuent des tracts ou entonnent des chants contre l’empire Bolloré. Certains Relay ont préféré fermer sur-le-champ plutôt que d’être affichés comme magasins de la haine — toute publicité n’est pas bonne à prendre. On peut aisément imaginer que ce type d’interventions s’intensifie dans les temps à venir. Ou que, lors de prochains mouvements sociaux, bloquer les gares visera aussi à mettre hors d’état de nuire ces points cruciaux de l’empire Bolloré.


Ces quelques actions montrent comment on peut partir à l’assaut d’un secteur précis du groupe Bolloré. Chacune offre un angle d’attaque différent, touche de nouvelles personnes, et révèle à tous·tes une nouvelle facette de l’empire. D’autres sont à imaginer. Comment initier une défection des auteur·ices et politiser un refus d’être publié·e chez Bolloré ? Comment co-organiser, avec les employé·es, des piquets devant les dépôts, et les centres logistiques de Hachette ? Comment perturber les agences de pub qui font la promotion des livres d’extrême droite ? Ces questions sont autant de champs d’action qui doivent être creusés pour qu’une acide intranquillité vienne ronger le monopole du groupe Bolloré sur l’édition. Une des prochaines batailles aura en ce sens lieu dans les établissements scolaires qui sont arrosés chaque année de manuels Hachette. Des personnels de l’Éducation nationale, syndicalistes et parents d’élèves ont d’ores et déjà lancé la dynamique dans une nouvelle tribune publiée à l’occasion des journées d’action : « Pour une école émancipatrice, solidaire et inclusive, boycottons les manuels scolaires édités par l’empire Bolloré20. » Si ce mot d’ordre s’avère partagé largement au sein de l’Éducation nationale, qui sait jusqu’où ce refus peut aller ?

Bien sûr, ce n’est pas un marque-page dans un livre ou une tribune qui feront tomber le géant Hachette. Mais la multiplication des points de pression venant à la fois de lecteur·ices, auteur·ices, librairies, éditeur·ices, employé·es, profs, élèves et parents d’élèves, combinée avec des actions collectives et directes au niveau de nœuds stratégiques permet de toucher le groupe en plusieurs endroits, de l’extérieur comme de l’intérieur. Penser le démantèlement de l’empire Bolloré, secteur par secteur, c’est donc réussir à identifier comment une filière fonctionne pour l’attaquer jusqu’à trouver le point de rupture, le seuil de l’intolérable pour l’économie et l’image du groupe.

II. Trouver les points de bascule


Avant le lancement de la campagne « Désarmer Bolloré », nous étions très nombreux·ses à n’avoir qu’une vague idée de ses activités en dehors du versant médiatique. À mesure que nous nous renseignions, nous avons été forcé·es de constater l’ampleur et la cohérence du groupe. Derrière la diversité des secteurs qui ont été ou qui sont encore contrôlés, il y a une trame globale, néocoloniale et fascisante, qui va de l’esclavagisation des populations dans les champs de palmiers à huile au racisme décomplexé dans ses médias, du contrôle des infrastructures portuaires en Afrique au traçage et à la gestion de flux de populations, notamment aux frontières, via les entreprises IER, Automatic Systems et Easier présentes en Europe21.

Mais au-delà de cette colonne vertébrale, y a-t-il une cohésion plus grande entre les activités du groupe qui pourrait nous intéresser dans la perspective du démantèlement ? L’intuition première est que le groupe Bolloré fabrique et soutient économiquement des médias réactionnaires pour faire gagner l’extrême droite : les revenus de ces activités sont en partie réinjectés pour la construction d’un arsenal de propagande. Mais plus on cherche, plus on se rend compte que cette idée peut être retournée : le groupe Bolloré pèse de tout son poids dans des élections pour s’ouvrir des parts de marché, déréguler et privatiser des pans entiers de l’économie. Ainsi, si son offensive médiatique en faveur de l’extrême droite semble inédite en France, il en est loin d’en être à son coup d’essai en termes de manipulation des scrutins électoraux. Des propres aveux de Vincent Bolloré, au Togo et en Guinée, le groupe a financé les campagnes des dictateurs Faure Gnassingbé et Alpha Condé. En Guinée, Havas a pris en charge les frais de communication de la campagne de M. Condé, ainsi qu’une partie de la publication d’un livre d’entretiens avec le futur président guinéen réalisé par le biographe officiel de la famille Bolloré22. Objectif atteint, moins de trois mois après l’arrivée au pouvoir d’Alpha Condé, celui-ci résilie la concession du port de Conakry et la confie sans appel d’offres à Bolloré Africa Logistics23. Comment ne pas faire le parallèle avec la biographie de Jordan Bardella dont la promotion est assurée par les agences Havas ou avec la création d’émissions comme On marche sur la tête, entièrement dédiée à l’union des droites, dans l’entre-deux tours des dernières législatives ?

La question n’est certainement pas : est-ce que le groupe Bolloré veut influencer les élections en France, comme il l’a déjà fait en Afrique ? Mais : pourquoi ? Par conviction idéologique, certainement. Mais cette réponse, aussi vraie soit-elle, a tendance à réduire notre vision aux intentions d’un seul homme. Cela participe insidieusement d’une sorte de fascination pour les ennemis de classe. Nous avons également besoin de comprendre les intérêts matériels d’une méga machine économique comme le groupe Bolloré. Si pour le moment, nous sommes obligé·es de nous en tenir à des hypothèses, des promesses du RN comme celle de privatiser l’audiovisuel français serait pour le groupe Bolloré sans doute aussi intéressante que la concession d’un port.


Il y a donc non seulement une cohérence entre les différentes filières de l’empire Bolloré, liées au sein d’un projet raciste et néocolonial, mais également une fonction de vases communicants entre domination économique, influence politique et mainmise culturelle. Comprendre cette solidarité entre les différentes filières du groupe permet de penser l’effet ricochet de chacune des actions. Un peu comme dans un jeu de dominos, cibler une de ces entreprises, c’est aussi viser toute la structure. Tout d’abord, car cela permet une mise en lumière des différentes ramifications du groupe, mais aussi en venant montrer et attaquer cette solidarité politique tacite entre chaque filière.


Une des questions qui se pose alors porte sur le ou les dominos sur lesquels pousser en premier. Autrement dit : comment choisir des cibles ? Quel angle d’attaque est pertinent ? Pour répondre à ces questions, plusieurs outils ont été mis en place. Une carte publique et collaborative se trouve sur le site desarmerbollore.net24. Elle est issue de recherches permettant d’identifier quelles sont les entreprises qui appartiennent au groupe Bolloré et où elles se situent.

Cette carte a plusieurs fonctions. D’abord, partager très largement une réalité matérielle. Elle dit : « Il est aussi près de chez vous. » Plus de cent soixante points y figurent en France, mais aussi en Suisse, en Belgique, en Allemagne, et au Luxembourg. Elle permet en outre de faire apparaître visuellement comment se composent les différents secteurs du groupe Bolloré. Et bien sûr, cette carte est aussi une invitation à ce que chacun·e enquête de son côté, pour ajouter des points oubliés ou rendre visite à ceux déjà recensés, en allant faire un détour en voiture ou une balade entre ami·es et regarder à l’occasion quels sont les accès qui mènent à telle entreprise, comprendre le site et son fonctionnement, imaginer comment la bloquer, la perturber ou la désarmer. Puis, il s’agira de poursuivre l’enquête pour comprendre plus précisément le site et son fonctionnement : quels sont les horaires de travail ? De quels syndicats sont les délégué·es du personnel ? Quand est-ce que passe l’entreprise de gardiennage ?

Lors de la première vague de journées d’actions décentralisées, plus de soixante mobilisations ont eu lieu partout en France et en Belgique. C’est une preuve que la carte a été fortement réappropriée. Tous les secteurs de l’empire Bolloré ont été touchés. Par exemple, les technologies de contrôle et de traçage ont été ciblées en divers endroits, démontrant ainsi qu’elles sont elles-mêmes peu sécurisées : désarmement du site d’Easier qui se targue de « contrôler le monde depuis la ville de Wavre25 » en Belgique, peinturlurage géant du site de IER à Nantes, intrusion dans le site de Automatic Systems suivi d’un rassemblement à Besançon. Ces journées d’actions décentralisées font ainsi office de premier round. Ensemble, elles forment une offensive globale sur le groupe, n’épargnant aucune de ses activités.

Bien sûr, il faudra plus de soixante mobilisations pour commencer à impacter réellement un empire comme celui de Bolloré. Mais d’ores et déjà, des points saillants apparaissent, certaines cibles peuvent constituer des angles d’attaque pertinents pour déstabiliser le reste de l’empire. Par exemple celui du lien entre le groupe Bolloré et la recherche publique. À Grenoble, des étudiant·es se sont introduit·es dans le laboratoire de l’UGA (Université Grenoble Alpes) qui fait de la recherche pour Blue Solutions26. Dans ce labo, les chercheur·euses du CNRS (Centre national de la recherche scientifique) travaillent pour Bolloré sur le développement de batteries solides Lithium Métal Polymère. À Montpellier, des militant·es sont allé·es alerter les salarié·es du CIRAD (Centre de coopération internationale en recherche agronomique pour le développement) qui travaille à l’amélioration de variétés de palmiers à huile en partenariat avec la Socfin, holding détenue à 40 % par Bolloré qui gère des centaines de milliers d’hectares de plantations en Afrique et en Asie du Sud-Est et est connue pour ses exactions coloniales27. Plusieurs instituts de recherches collaborent avec le groupe Bolloré comme par exemple au CEA (Commissariat à l’énergie atomique et aux énergies alternatives, à l’Université de Nantes, à la Sorbonne, au Collège de France — pour Blue Solutions —, mais aussi à Clermont-Ferrand ou à Gand en Belgique pour optimiser (et verdir) les activités de la Socfin. Ces partenariats sont, a minima, absurdes, voire suicidaires. Ils consistent à faire travailler des chercheur·euses sur les projets d’un groupe dont les médias soutiennent et appuient le démantèlement de l’université. À partir de ce constat, on peut imaginer qu’une rentrée pour sortir Bolloré des universités puisse prendre forme, créant des ponts entre les différentes actions au sein de la campagne et amplifiant ainsi leur écho : en parallèle de la tribune des professionnel·les de l’Éducation nationale appelant à boycotter les manuels Hachette, les activités de recherche de ces laboratoires pourraient être perturbées, par tous les moyens à la portée des étudiant·es, des chercheur·euses en rébellion et des militant·es.


Saisir la cohérence des activités du groupe Bolloré permet donc de trouver de nouvelles façons de lui faire face. Puisque que des interconnexions entre ses différentes activités se dessinent, puisqu’elles partagent des intérêts économiques, il est possible d’attaquer n’importe quel point de l’empire pour toucher le tout. La portée de ces actions, à l’instar des journées de janvier 2025, peut au premier abord paraître principalement symbolique mais c’est justement ce mouvement d’alternance entre enquête et action alimenté par les initiatives locales, qui permet d’identifier et de tester, en acte, des potentiels points de bascule. Ces actions permettent également de révéler des points de faiblesse au cœur de cet empire, des nœuds stratégiques où appuyer pour amorcer un processus de démantèlement.

III. Construire notre camp


Cibler le groupe Bolloré parmi tous les acteurs de l’extrême droite et parmi tous les milliardaires problématiques n’était pas une évidence, mais plutôt un choix stratégique en soi. Lancer une campagne autour d’un « super-ennemi », c’est un moyen de proposer une direction claire, un angle d’attaque précis aux forces et énergies qui se sont retrouvées éparpillées après les élections législatives. Le groupe Bolloré coche toutes les cases, parce que son rôle de propagandiste en chef est largement connu et documenté, parce que le caractère colonial, raciste et extractiviste de ses activités est paradigmatique. Mais cette stratégie de lutte ne fonctionne que si l’empire Bolloré ne devient pas l’arbre qui cache la forêt. Il suffit de regarder, outre-Atlantique, l’alignement des milliardaires de la tech devant Trump pour saisir l’ampleur de la situation.

Il faut comprendre le phénomène Bolloré comme un des symptômes du capitalisme en crise. Crise écologique, crise morale du patriarcat, crise de l’hégémonie devant l’apparition de nouvelles superpuissances impériales et de nouvelles guerres à caractère mondial, crise de création de la valeur et fuite en avant dans des systèmes spéculatifs. Et surtout crise de légitimité, rupture de la confiance. Ce dernier point ne veut certainement pas dire qu’il existe une force révolutionnaire organisée où même une idée largement partagée d’un au-delà du capitalisme. Seulement qu’il est aisé de constater qu’il y a quelque chose de cassé dans la confiance des populations envers les démocraties libérales. Faire ici la liste de tous les indicateurs d’une telle crise de la légitimité serait trop long. Mentionnons, à titre d’exemple et pour le seul cas de la France : les Gilets jaunes, les massifs mouvements contre la réforme des retraites, les révoltes contre le meurtre de Nahel, la gronde agricole de 2023, le nombre exponentiel de ministres sous enquête. On peut lire le tournant réactionnaire du capitalisme comme une réaction face à ces crises. Pour le dire avec Gramsci, l’hégémonie est en voie d’être remplacée par la domination28. Autrement formulé, dans la phase actuelle, le capitalisme assume — revendique — la guerre qu’il mène à une très large partie de la population. La tendance n’est plus à masquer la domination brutale sous le confort feutré de concepts réservés à une minorité de la population comme l’état de droit ou des élections dont on respecte le résultat.

Pour notre camp, il s’agit de se poser les questions : comment ne pas rester empêtré·es dans un mode défensif qui justifierait de sauver nos systèmes d’oppression actuels en craignant pire ? Comment faire émerger de possibles autres manières de vivre que le capitalisme, qu’il soit néolibéral ou fascistoïde ? Comment assumer la guerre qui nous est faite, et passer à l’offensive de façon large, populaire et déterminée ?


Face à toutes ces questions, nous concevons la campagne « Désarmer Bolloré » comme une invitation à se mettre en mouvement pour faire face à la résistible ascension des droites extrêmes. Les forces collectives qui se rassemblent dans cette campagne, les rencontres qui ont lieu, les modes d’action qui sont expérimentés et perfectionnés, les connaissances sur l’écosystème des grands groupes capitalistes qui sont engrangées sont autant de ressources mobilisables dans la lutte pour faire obstacle à la fascisation de la société. La proposition est bien, au-delà de Bolloré, de constituer un front commun. Comment cela fonctionne ? Dans un rapport dynamique entre des actions locales qui se coordonnent, se font écho, se renforcent les unes les autres, et une communication globale, soutenue par les organisations de la campagne, pour offrir aux mobilisations une caisse de résonance aussi grande que possible. Pour le dire autrement, ce mouvement peut sembler simple. Il se construit en réalité, petit à petit, à travers de nombreuses rencontres, réunions, temps d’élaboration, et de synchronisation pour la mise en exécution des différentes phases. Faire front, n’est pas un mot d’ordre unitaire crié à la va-vite, c’est un défi organisationnel et opérationnel.

Cela va de se mettre d’accord à plus de 150 organisations sur un même texte d’appel, jusqu’à construire au fil des mois des temps communs, telles que les journées d’actions décentralisées de janvier 2025, pour que chaque groupe local puisse frapper dans un même laps de temps. Cela passe aussi par partager et diffuser de l’information : des dizaines de soirées publiques ont été organisées un peu partout en seulement quelques mois. Ou encore par réussir à diffuser des centaines de milliers d’impressions en tout genre, marque-pages, stickers, affiches, flyers, etc. Cela peut encore vouloir dire, préparer des mobilisations d’ampleur, comme le grand assaut mené par une armada de bateaux, prévu le 24 mai 2025 sur l’île du Loc’h, que Bolloré a privatisé, au large de Concarneau, en Bretagne. Toutes ces tâches, aussi prosaïques soient-elles, demandent l’investissement de centaines, voire de milliers de personnes, qui au fil des actions partagent une culture de lutte commune. Ainsi un sabotage de nuit, réalisé grâce à la beauté de l’anonymat, comme ce fut le cas contre l’usine Easier à Wavre29 peut résonner avec un collage réalisé, par exemple, à Saint-Laurent du Maroni en Guyane30 et avec bien d’autres actions encore.


Construire cette force de frappe commune est ce qui peut nous permettre d’enrayer la montée de l’extrême droite au-delà de l’empire Bolloré. Pierre-Edouard Stérin, PDG de Smartbox et du fonds d’investissement Otium, constitue une autre cible de choix. Il est un acteur clé d’une galaxie d’initiatives réactionnaires. Il a investi 150 millions d’euros dans le projet Périclès31 qui a pour but de porter le RN au pouvoir, en l’aidant, entre autres, à conquérir 300 mairies en 202632. Il a également financé directement l’Institut de Formation Politique (IFP) qui alimente les chaînes d’info de Bolloré en sous-journalistes et politistes biberonnés aux éléments de langage des droites réactionnaires33. Dans ces nombreuses initiatives, on trouve les Nuits du Bien Commun. Fondées en 2017, ce sont des soirées bon teint visant à financer un fonds de dotation lui aussi pour le « bien commun » dans lequel Stérin a déjà investi plus de 800 millions d’euros. Les projets qui gravitent autour de ces Nuits du Bien Commun sont, pour une part non négligeable, des associations anti-avortement, révisionnistes, identitaires, nationalistes ou encore catholiques intégristes. On y trouve des proches de Zemmour, de Marion Maréchal-Le Pen, des figures notoires de groupuscules néonazis, ou encore des membres du Journal du Dimanche (JDD) et de Valeurs actuelles (appartenant à Bolloré) étant passés par l’IFP. Les Nuits du Bien Commun remplissent allégrement les caisses d’une myriade d’initiatives d’extrême droite tout en défiscalisant en masse34. Elles servent aussi de rendez-vous de réseautage, structurant les bourgeoisies intégristes locales.

Une des particularités de ces Nuits est qu’elles ont lieu très régulièrement, dans de nombreuses villes. Avec plus de quinze lieux annoncés pour 2025, c’est une sorte de tournée permanente. Mais pour le moment, les Nuits du Bien Commun ont globalement réussi à passer sous les radars des organisations antifascistes ou féministes. Ils officient en grande pompe, dans des salles souvent publiques, sans presque être dérangés. Quand une manifestation contre une Nuit est organisée, comme ce fut le cas, avec beaucoup de succès, à Rennes, fin novembre 2024, celle-ci a un écho principalement local. Mais alors que nous finissons d’écrire ce texte, une campagne d’action contre ces Nuits du Bien Commun est sur le point d’être lancée par un collectif antifasciste. « Désarmer Bolloré » en sera l’un des acteurs et lui donnera autant d’écho que possible afin qu’aucune de ces Nuits ne puisse avoir lieu sans être perturbée ou bloquée. Pour que, de dates en dates, des coalitions toujours plus grandes, réunissant syndicats, AG antifascistes, collectifs féministes, organisations écologistes, fassent en sorte que la galaxie Stérin ne trouve plus aucune salle à louer. Il y a là un concours à lancer. Qui aura les plus belles banderoles ? Qui aura le cortège de tête le plus massif ? Qui réussira à encercler la salle où se tiennent ces Nuits ? Qui empêchera les participant·es d’y rentrer ?


L’empire Bolloré et la galaxie Stérin sont de ces structures économiques en campagne permanente pour imposer un monde ultra-libéral et ultra-conservateur. Depuis plusieurs années, elles organisent le renouveau de l’extrême droite, et ce bien au-delà du Rassemblement National. Elles l’alimentent financièrement et idéologiquement. Stérin et Bolloré représentent ce lien, toujours présent, entre économie et domination, ils sont la face brutalement prédatrice du capitalisme. Un des paris de la campagne « Désarmer Bolloré » est de cibler ce lien en constituant un large front de lutte doté de forts ancrages territoriaux. L’expérience des Soulèvements de la terre nous indique que c’est en mouvement, d’actions en actions qu’une telle dynamique se crée et se solidifie. Nous avons tenté d’expliquer, comment, au quotidien et de façon très terre-à-terre, un tel front se constitue. Nous allons continuer, dans les mois et les années qui viennent, à le faire grandir. Nous voulons apprendre, avec un nombre encore plus grand de collectifs, de groupes, d’organisations, qu’elles soient issues de l’écologie ou de l’antifascisme, du féminisme ou du syndicalisme, à combattre ensemble.

Attaquer en de multiples points un secteur ou une filière ; identifier des liens entre les filières afin de comprendre où des assauts précis peuvent déstabiliser l’ensemble ; construire, pied à pied, un front de lutte vaste et offensif. Telles sont les trois hypothèses que nous proposons pour penser le démantèlement d’un empire aussi vaste que celui de Bolloré. Elles sont exposées ici de façon embryonnaire, car la campagne « Désarmer Bolloré » n’en est qu’à ses débuts. Mais nous croyons fermement qu’elles valent plus que les programmes électoraux ou les promesses toujours repoussées du Grand Soir qui nous confinent dans une apathique attente. Si ce plan ne doit avoir qu’une vertu, c’est sûrement la suivante : nous avons commencé. Nous pensons, avec des milliers d’autres, qu’il n’y a plus à s’indigner de la montée de l’extrême droite. Comme si nous devions nous contenter d’être sur le banc de touche et de prendre acte des points que marque l’ennemi. Nous voulons briser la stupeur et l’effroi qui, trop souvent, nous paralysent : démanteler, non seulement l’empire Bolloré, mais toute l’impériale domination du capitalisme sur la surface de cette Terre.


  1. Emmanuel Clévenot, « “Femme”, “climat”… Trump interdit des mots dans les articles scientifiques », Reporterre, 12/02/2025, disponible sur : https://reporterre.net/Femme-climat-Trump-interdit-des-mots-dans-les-articles-scientifiques 
  2. « Offensive obscurantiste aux USA : Trump crée un “bureau de la foi” et censure le monde universitaire », Contre Attaque, 14/02/2025, disponible sur : https://contre-attaque.net/2025/02/14/offensive-obscurantiste-aux-usa-trump-cree-un-bureau-de-la-foi-et-censure-le-monde-universitaire/ 
  3. Le Monde avec AFP, « Mayotte : l’Assemblée nationale vote une proposition de loi pour restreindre davantage le droit du sol », Le Monde, 06/02/2025, disponible sur : https://www.lemonde.fr/societe/article/2025/02/06/l-assemblee-nationale-vote-une-proposition-de-loi-visant-a-restreindre-davantage-le-droit-du-sol-a-mayotte_6534839_3224.html 
  4. « Le RN est au pouvoir, et c’est le RN qui le dit », Contre Attaque, 26/09/2024, disponible sur : https://contre-attaque.net/2024/09/26/le-rn-est-au-pouvoir-et-cest-le-rn-qui-le-dit/ 
  5. « Appel à désarmer l’empire Bolloré ! », disponible sur : https://desarmerbollore.net/appel 
  6. Les Soulèvements de la terre, Premières secousses, Paris, La fabrique, 2024. Cf. la partie 1 : « Désarmer le béton. » 
  7. Les Soulèvements de la terre, Premières secousses, op. cit. Cf. la partie 2 : « Démanteler le complexe agro-industriel. » 
  8. La campagne d’actions décentralisées contre Lafarge en décembre 2023 et plus récemment l’action de blocage du port de La Rochelle (d’où sont exportées intensivement des céréales) lors de la mobilisation antibassines de juillet 2024 sont de bons exemples. 
  9. « Vincent Bolloré parie sur le tabac, son développement en Afrique et… la SEITA », Les Echos, 11/07/1994, disponible sur : https://www.lesechos.fr/1994/07/vincent-bollore-parie-sur-le-tabac-son-developpement-en-afrique-et-la-seita-885963 
  10. Cf. l’appel à la campagne « Désarmer Bolloré » : « Il est le second actionnaire de la holding luxembourgeoise Socfin qui contrôle environ 390 000 ha de concessions de palmiers à huile et d’hévéas en Afrique et en Asie. Déforestation, spoliation des terres, mauvais traitement des populations riveraines, conditions de travail inhumaines, etc. », disponible sur : https://desarmerbollore.net/appel 
  11. En 1998, Bolloré achète SAGA France et ses filiales DIAF, SCTT, Peschaud, opérateur international spécialisé en transport maritime, aérien et express, logistique, projet industriel et opérations en douane. 
  12. Seulement Bolloré Energy est gardé, donc les dépôts pétroliers, de fioul domestique et le transport de ces marchandises. 
  13. Automatic Systems, Easier produisent des barrières de sécurité et des portiques, notamment pour les autoroutes et les aéroports. Smart City Platform, Indestat et Track & Trace sont des solutions logicielles pour les villes, les États et les acteurs industriels pour le traçage des marchandises et des populations. Blue produit des batteries au lithium et des véhicules électriques, notamment des bus. Nous en reparlons dans la suite du texte. 
  14. Mathilde Boussion, « MultiChoice, joyau de l’audiovisuel africain, en passe d’intégrer la galaxie Bolloré », Le Monde, 09/06/2024, disponible sur : https://www.lemonde.fr/economie/article/2024/06/09/multichoice-joyau-de-l-audiovisuel-africain-en-passe-d-integrer-la-galaxie-bollore_6238109_3234.html ; Haby Niakaté, « Canal+ à l’assaut de l’Afrique francophone », Le Monde, 08/04/2018, disponible sur : https://www.lemonde.fr/economie/article/2018/04/08/canal-a-l-assaut-de-l-afrique-francophone_5282515_3234.html 
  15. Bolloré en possède plus de 200. Cf. la carte des maisons d’édition disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/carte-des-maisons-d-editions-et-medias-de-l-empire-bollore 
  16. « 100 librairies s’engagent à escamoter les livres Bolloré | Tribune », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/les-librairies-s-engagent-a-escamoter-les-livres-Bollore 
  17. « Les Relay submergés de marque-pages et stickers contre Bolloré — la note d’information de Lagardère », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/relay-la-note-d-info-de-lagardere 
  18. « Tuto | Comment bien zbeuler ton Relay », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/tuto-comment-zbeuler-ton-relay 
  19. « Les enseignes Relay/Bolloré ciblées à travers la France », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/les-enseignes-relay-ciblees-a-travers-la-france 
  20. « Tribune | Des personnels de l’éducation nationale, syndicalistes et parents d’élèves se mobilisent contre l’emprise de Bolloré dans nos écoles », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/ne-laissons-pas-Bollore-envahir-les-manuels-scolaires-et-les-cerveaux-de-nos-enfants 
  21. Ces activités moins connues sont représentatives d’une vision du monde où chaque déplacement, de marchandise comme de personne, serait à la fois contrôlé, maîtrisé et enregistré : IER est spécialisé dans l’optimisation de la chaîne logistique, l’entreprise produit des technologies déshumanisant les travailleur·euses et vend des solutions clé en main que le groupe promeut dans les salons de la police. Automatic Systems est le leader mondial du contrôle sécurisé des entrées tandis que Easier est le paradis du portique (anti-fraudeurs, biométriques, d’immigration, etc.). 
  22. « Complément d’enquête. La lune de miel entre Vincent Bolloré et le président guinéen Alpha Condé », France Info, 22/07/2016, disponible sur : https://www.francetvinfo.fr/monde/afrique/video-complement-d-enquete-la-lune-de-miel-entre-vincent-bollore-et-le-president-guineen-alpha-conde_1534047.html 
  23. « La Cour de cassation valide la procédure visant Vincent Bolloré pour corruption au Togo », Jeune Afrique, 30/11/2023, disponible sur : https://www.jeuneafrique.com/1509799/politique/la-cour-de-cassation-valide-la-procedure-visant-vincent-bollore-pour-corruption-au-togo/ ; « Port de Conakry : l’affaire Bolloré déclarée “prescrite” par la justice française », Jeune Afrique, 19/07/2019, disponible sur : https://www.jeuneafrique.com/805638/economie-entreprises/port-de-conakry-laffaire-bollore-declaree-prescrite-par-la-justice-francaise/ 
  24. « La carte de l’empire économique et médiatique du groupe Bolloré », disponible sur : https://desarmerbollore.net/la-carte 
  25. Valérie Druitte, « Made in Belgium : Automatic Systems contrôle le monde depuis Wavre », RTBF actus, 10/04/2013, disponible sur : https://www.rtbf.be/article/made-in-belgium-automatic-systems-controle-le-monde-depuis-wavre-7968569 
  26. Blue Solutions, c’est l’entreprise du groupe Bolloré qui conçoit des batteries lithium pour les véhicules électriques. 
  27. « PalmElit : semences de palmier à huile Cirad® », Cirad, disponible sur : https://www.cirad.fr/collaborer-avec-nous/solutions-cirad-innov/produits-et-services/palmelit et « Recherche et Développement » ; Socfin, disponible sur : https://socfin.com/recherche-et-developpement/ 
  28. « Si la classe dirigeante ne bénéficie plus d’un consensus en sa faveur, c’est-à-dire qu’elle n’est plus “dirigeante” mais “dominante”, exerçant uniquement la force de coercition, cela signifie précisément que les masses se sont détachées de leurs idéologies traditionnelles, et ne peuvent continuer à croire à ce en quoi elles croyaient jusque-là. », Antonio Gramsci, Cahiers de prison, Paris, Gallimard, 2021. 
  29. « La porte d’accès du bâtiment a été forcée en quelques minutes afin de saccager la machinerie lourde et les ordinateurs qui contribuent à façonner un monde verrouillé. Les vitres des bureaux ont été brisées, l’intérieur recouvert de peinture. Il n’est également plus possible de badger pour rentrer dans le bâtiment. », « Dimanche 26 janvier — Wavre, Belgique, Désarmement de l’entreprise Bolloré Easier », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/wavre-belgique-desarmement-de-l-entreprise-bollore-easier 
  30. « Collage contre Bolloré en Guyane », disponible sur : https://desarmerbollore.net/news/la-guyane-contre-bollore 
  31. Acronyme de patriotes, enracinés, résistants, identitaires, chrétiens, libéraux, européens, souverainistes. 
  32. Thomas Lemahieu, « Pierre-Édouard Stérin, saint patron de l’extrême droite française #15. Avec Périclès, Pierre-Édouard Stérin entend faire basculer 1 000 mairies aux mains des droites extrêmes en 2026 », L’Humanité, 12/02/2025, disponible sur : https://www.humanite.fr/politique/droite/avec-pericles-pierre-edouard-sterin-entend-faire-basculer-1-000-mairies-aux-mains-des-droites-extremes ; « Pierre-Edouard Stérin, saint patron des réacs », Le Nouvel Obs, 12/02/2025, disponible sur : https://www.nouvelobs.com/dossiers/20250212.OBS100225/pierre-edouard-sterin-saint-patron-des-reacs.html 
  33. Thomas Lemahieu, « Pierre-Édouard Stérin, saint patron de l’extrême droite française #14. Thibault de Montbrial, cheville ouvrière de Pierre-Édouard Stérin pour faire converger les droites extrêmes », L’Humanité, 12/02/2025, disponible sur : https://www.humanite.fr/politique/anti-avortement/thibault-de-montbrial-cheville-ouvriere-de-pierre-edouard-sterin-pour-faire-converger-les-droites-extremes ; Elodie Guéguen, « Pierre-Edouard Stérin, le milliardaire au service des droites extrêmes », France Inter, 22/02/2025, disponible sur : https://www.radiofrance.fr/franceinter/podcasts/secrets-d-info/secrets-d-info-du-samedi-22-fevrier-2025-3617308 
  34. L’équipe de Stérin, qui a levé près de 1,4 millions d’euros à l’Olympia (propriété de Bolloré) début décembre 2024, l’a bien rappelé : « Ce soir, vous serez généreux, mais le plus généreux, ça restera… L’ÉTAT. », Youmni Kezzouf, « À l’Olympia, une soirée pour financer l’écosystème catho-tradi », Mediapart, 10/12/2024, disponible sur : https://www.mediapart.fr/journal/politique/101224/l-olympia-une-soiree-pour-financer-l-ecosysteme-catho-tradi 

Pour citer cette contribution :

Ou alors :

Ont travaillé à la production de la publication multiformat Déborder Bolloré : Adrien, Arnaud, Alaric, Arnaud, Benny, Camille, Clara, Coralie, Éléonore, Emmanuel, Jérôme, Johan, Julie, Léna, Merlin, Nicolas, Pascale, Quentin, Rodhlann, Théo, Yann et Zoé.